Raholiariseheno Nicole Norosoa, une figure citoyenne de développement œuvrant auprès des jeunes

Qu’est ce qu’être un citoyen d’un pays ? Est ce que c’est payer les impôts, contribuer au développement, voter ? En effet, chacun a sa manière de se placer dans la vie sociétale. Il y a certaines qui essaient de survivre du jour le jour, et il y a d’autres qui travaillent pour que ces premières puissent jouir d’une réalité juste et équitable. C’est ce que notre interview du jour s’est vouée afin de témoigner d’un avenir de Madagascar soutenant ses citoyens dans une éducation de développement

Pouvez vous vous présenter ,s’il vous plaît et ce que vous faites dans la vie ?

Je m’appelle Nicole Norosoa RAHOLIARISEHENO. Je suis consultante en Management de projets auprès des associations. À part cela, je fais aussi du coaching pour les jeunes.

Qu’est ce que cela implique de travailler auprès des jeunes et des associations ?

J’ai décidé de mettre ma compétence au service de la société civile orientée vers l’éducation et le développement social.

J’accompagne les associations dans l’élaboration de leur projet associatif. L’appui peut aller de la création même jusqu’à l’élaboration du plan stratégique de développement où on peut rédiger ensemble des projets de changement à réaliser et à soumettre aux partenaires.

Ayant constaté l’absence d’encadrement quand j’étais à l’université et le manque d’accompagnement au début de ma carrière professionnelle, j’ai pris l’initiative d’appuyer des jeunes qui préparent leur mémoire et qui font leur premier pas dans le monde professionnel que ce soit dans la mentalité à avoir, la préparation des paperasses nécessaires ou l’obtention de poste.

Qu’est ce que cela fait d’être une femme dans le secteur de la consultance ?

Dans le monde de la consultance, la concurrence est rude surtout à cause du favoritisme. Aussi, en tant que femme, obtenir un marché n’est pas toujours facile face à un environnement où règne « un réseau d’hommes ». L’approche genre mise en avant par la société civile qui encourage la candidature féminine ouvre de plus de portes à des femmes au métier de consultance. Par voie normale, un bon bagage de formations et des années d’expériences probantes dans le domaine sont nécessaires pour pouvoir mériter sa place dans le réseau.

Plusieurs personnes ont peur de se lancer ou de changer de métier ? Quelle en serait la raison ?

Cette question me fait rire vu que j’ai récemment quitté un poste que j’ai occupé depuis des années. Rires. Les raisons peuvent être nombreuses :

  • quand on n’a pas encore toutes les cartes en main pour peser le pour et le contre, on préfère rester dans un environnement de travail qui ne nous est pas favorable.
  • la peur de se lancer ou de changer de métier peut aussi venir du fait que la personne n’est pas encore prête de quitter sa zone de confort pour aller à la quête de l’inconnu ou peut être du connu, mais qu’elle pense à tous les efforts qu’il faut encore déployer, elle n’ose pas faire le pas.
  • il y a aussi la peur de l’incompétence en pensant à intégrer une nouvelle entreprise, en occupant un nouveau poste ou en créant sa propre boîte.
  • il y a surtout la peur du regret.
  • il y a aussi l’image qu’on véhicule que changer d’emploi n’est pas toujours bon en soi, que c’est un signe de rupture d’engagement, de fidélité et d’immaturité.

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il faut avoir un plan de carrière pour pouvoir évoluer professionnellement et personnellement. La décision de changer de carrière joue toujours en notre faveur si on a déjà une petite idée de ce qu’on veut faire après. Donc, j’encourage ceux et celles qui hésitent à préparer leur changement de métier en économisant de l’argent de côté et à réfléchir à un plan de carrière. Les frontières sont dans la tête.

Aujourd’hui, les jeunes commencent de mieux en mieux à vouloir entreprendre et participer aux développements, direz-vous que votre coaching marche ?

Le coaching à lui seul n’est pas le seul facteur. L’influence des réseaux sociaux contribue beaucoup à ce réveil. En parallèle, on voit la fluctuation des associations qui font appel à des jeunes volontaires pour faire avancer des causes humanitaires de développements et à se lancer dans l’entrepreneuriat. Cette participation aux développements et à l’entrepreneuriat est non seulement un engagement, mais est aussi devenue pour les jeunes une recherche d’expériences pour embellir leur CV.

En conséquence, certes, il y a les coaching ici et là , mais ce qu’on peut dire, c’est que les jeunes veulent gagner en expérience dès leur plus jeune âge pour faire face dans un futur proche aux rudes critères qu’impose le monde du travail en terme d’expériences.

Qu’est ce qui fait que peu de jeunes n’arrivent à comprendre leur place dans le développement du pays ? Quel est le rôle du gouvernement envers les jeunes ? A-t-on donné suffisamment de la place aux jeunes Malagasy ?

Déjà, la population pense que le développement d’un pays est le rôle du gouvernement. Ce dernier ne peut être dissocié de la politique alors que le paysage politique de Madagascar n’a fait refléter depuis des années que la politique, c’est le « truc » des vieux dinosaures. Les jeunes ont ,alors, du mal à voir où et quand est ce qu’ils doivent intervenir pour impacter.

Par rapport à cela, le gouvernement doit ,alors, favoriser des plateformes d’échanges pour qu’il y ait un dialogue avec les jeunes et penser à mettre en exécution les grandes lignes de la politique nationale de la jeunesse.

On a donné suffisamment de la place aux jeunes malgaches en tant qu’instrument politique et de grève, oui. Mais, on croise les doigts, des changements sont en cours si on ne parle que de l’élection d’un jeune président de la République, la nomination de quelques jeunes pour occuper des postes de Ministre ou de directeurs au sein des Ministères. On constate aussi un peu de positif dans l’insertion professionnelle des jeunes et dans la promotion du sport.

Pourquoi les jeunes ont ils besoin d’être suivis et orientés ? Y aurait-il un manque de gouvernance sur la thématique de la jeunesse Malagasy ?

C’est la notion d’orientation et de suivis même qui est quasi absente à Madagascar. On ne fait que mettre en place, on inaugure et puis, c’est fini. Pas de note d’utilisation, pas de suivi d’évaluation. Tout comme un jeune qui étudie, qui poursuit ses études à l’aveuglette, obtient son diplôme et qui a pour finalité de trouver un travail. Il est plus que temps d’évaluer et remettre en question le système économique et éducatif existant et projeter leurs éventuelles évolutions afin de pouvoir orienter les jeunes à opter pour tel ou tel secteur clef. Cela facilitera aussi leur suivi.

Ce n’est pas qu’il y a un manque de gouvernance sur la thématique de la jeunesse Malagasy, je dirais plutôt qu’il y a une incapacité à répondre aux besoins. Il y a trop d’actions à faire si on veut avoir une jeunesse qui sait et fait ce qu’il a vraiment envie de faire, indépendante, épanouie et qui n’aura plus besoin d’une orientation et d’un suivi.

Vous êtes jeune, ambitieuse , remplie de vision, qu’est qui manque à la jeunesse Malagasy pour contribuer à la réalisation d’une vision d’ensemble ?

D’abord, il faut qu’ils aient des visions pour arriver à cette vision d’ensemble. Avoir une vision, c’est avoir de l’espoir, c’est croire à l’utopie. Mais, ce qui est triste ce que c’est cette flamme qui même sans avoir été allumée, s’est éteinte. Les jeunes n’ont plus espoir et ils ne font que survivre dans le système. La moindre des choses à faire est, alors, d’avoir la conviction que Madagascar n’est pas condamné et de penser que chaque petite contribution individuelle peut faire bouger les lignes. Il ne reste plus qu’à passer à l’action à son échelle.

Comment votre parcours a t’il débuté ? Quels étaient vos défis, vos sacrifices ? Y a t’il eu un surpassement de soi ou faut-il se surpasser pour arriver à être un élément appartenant au développement ?

L’éducation a été mon centre d’intérêt depuis mon enfance. J’ai toujours aimé jouer à la maîtresse-maîtresse. Rires. Cette passion pour le transfert de connaissances a mis sur mon chemin des enfants défavorisés analphabètes, des enfants qui suivaient les cours de dimanche à l’église, des jeunes éclaireuses issues du scoutisme, des jeunes universitaires et des jeunes bénévoles engagés dans des associations, des parents d’enfants en situation de handicap, des acteurs de prise en charge dans le secteur du handicap…

C’était difficile de jongler entre la gestion de vie de famille, le travail, l’école à l’université et les engagements communautaires. Par exemple, en 2017, j’ai décidé d’arrêter mes études pour me concentrer sur deux métiers. Aussi, il m’est déjà arrivé de ne pas rencontrer ma famille durant des mois, de travailler 24h/24 ou 7j/7, de rester dormir au bureau pour suivre des formations en lignes vu que je n’avais pas de connexion Internet chez moi, etc.

Avant mes 23 ans, mes actions étaient guidées par l’amour du partage, mais après j’ai senti que c’était un devoir et que je dois sortir de mon terrier. Et, c’est là que je me suis lancée plusieurs défis. J’ai été à terre plusieurs fois, mais une fois que je reprends de la force, je fonce à nouveau. Pour ma part, je n’ai pas demandé à avoir cette classification « d’élément appartenant au développement », je suis juste moi et j’essaye de me rendre utile autant que possible. D’où mon credo « aider mon prochain ».

Que conseillerez vous aux jeunes qui veulent changer les choses ?

On n’a pas besoin de porter une tenue de super héros pour l’être, on n’a juste qu’à donner la meilleure version de nous-même pour nous-même, d’abord, et au service du monde après. Soyez un bon être humain.

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